6 phrases toxiques en milieu de travail

Posted By on Fév 9, 2018


“Si nous comprenions le pouvoir impressionnant de nos mots, nous préférerions le silence à presque tout ce qui est négatif” – Betty Eadie

J’ai décidé de laisser la place à cette citation en guise d’introduction. Les mots, souvent, pèsent lourd, et tous ne sont pas très habiles pour pondérer l’impact potentiel qu’une remarque, qu’elle soit passive-agressive ou sincère, peut avoir sur l’environnement de travail.

Certains exemples extrêmes sont faciles à comprendre, comme plusieurs compagnies aériennes qui étiquettent leurs passagers “self-loading cargo”. D’autres termes nuisibles, cependant, sont tellement ancrés dans notre réalité, comme l’utilisation du mot “ressource” pour parler des gens.

Que signifie “toxique”, cependant? Pour ma part, les phrases toxiques sont celles qui génèrent du cynisme, lentement, goutte à goutte. Ça n’a pas l’air d’avoir d’effet sur le coup, mais après des années, on s’y baigne jusqu’au cou.

J’ai récemment posé la question sur LinkedIn : “Quelles sont les phrases toxiques que l’on entend au travail? Pourquoi sont-elles toxiques?”. Les réponses furent variées et fort intéressantes. Je m’en inspire donc pour écrire cet article.

Tu ne peux pas faire ça, ce n’est pas dans tes tâches…

Pour moi, cette affirmation résume une situation plus que problématique. D’abord, cela laisse croire que le champ d’action de chacun ne se limite qu’à ce qui est listé dans la description de tâches. Les gens ont été engagés pour ne faire qu’une chose, rien d’autre.

Bien dommage pour ceux qui veulent apprendre ou essayer quelque chose de nouveau, s’approprier un rôle ou une initiative n’est pas encouragé. Ça vous apprendra à vous soucier de l’entreprise pour laquelle vous travaillez.

Vous avez remarqué le cynisme dans mon dernier paragraphe?

C’était une décision d’affaires…

Non pas que la direction ne devrait pas prendre de décision (d’affaire ou non); mais les dites “décisions d’affaires” sont généralement des décisions unilatérales qui ont été prises en toute connaissance des conséquences négatives probables.

Comprenez-moi bien, c’est certainement plus que nécessaire dans bien des cas. Cependant, il me semble que les décisions d’affaires aient le dos large. Étiqueter toutes les décisions qui ont d’énormes impacts sur la motivation, l’épanouissement ou carrément la carrière des employés comme des “décisions d’affaires” n’efface pas toutes les conséquences de ces décisions.

Lors que j’entends “C’était une décision d’affaires”, mon cerveau traduit en “Nous étions au courant des conséquences, et nous avons décidé que nous étions à l’aise avec le fait que ça vous affecte négativement”. Il est donc primordial de bien exposer aux gens affectés le contexte et les raisons nécessitant de telles décisions. Autrement, les employés trouveront eux-même l’explication qui leur convient le mieux, ce qui sera rarement au profit de la direction ou de l’organisation.

A-t-on le choix? Pas toujours. Est-ce que ça crée du cynisme? Définitivement, si on ne réussit pas à bien expliquer.

J’ai décidé que…

C’est le petit frère de la décision d’affaires, donc à plus petite échelle. Les conséquences sont probablement bien moins graves, et c’est pourquoi il est si facile de prendre ces décisions tout seul. Cela n’affecte qu’une ou deux personnes après tout.

A-t-on pensé que des gens auront à vivre avec cette décision? Des personnes seront affectées directement et vivront avec l’impact de cette décision au jour le jour. Est-ce possible de, au mieux, les laisser prendre la décision? Au pire, les inclures dans la prise de décision?

Suite à l’excellente suggestion d’Isabelle Therrien, j’inclus ici un lien vers les différents niveaux de délégation de Jurgen Appelo. Cet outil sert justement à inclure votre équipe dans la prise de décision, tout en décidant ensemble de quelle type de délégation est nécessaire selon les cas.

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On a toujours fait comme ça…

Voilà la phrase phare des entreprises à la mentalité fixe (“fixed mindset”). S’il y a une seule constante dans l’univers, c’est le changement. Si une solution, une manière de faire, une approche a été idéale à un certain moment donné, je vous garantis que le contexte entourant cette façon de faire a changé maintenant. Les gens, leur maturité, leurs besoins sont différents. Tout autour a évolué, pourquoi la pratique n’évolue-t-elle pas?

Il semble que les organisations aient un besoin très important de stabilité et de contrôle, de prendre des décisions “une fois pour toutes”. Seulement, la seule stabilité à laquelle elles peuvent s’attendre est le changement. En ne s’adaptant pas, un processus devient trop lourd, encombrant, complexe ou inutile, et ce sont les gens qui en font les frais, car ce seront eux qui devront éternellement s’adapter.

On s’entend tous pour dire que…

Ceci est un simple pied de nez aux dissidents, un raccourci intellectuel misant sur le malaise des gens à exprimer leur désaccord avec la personne qui prend la parole. Une arme efficace dans les endroits où les conflits sains ne peuvent émerger et l’harmonie artificielle règne.

Cette approche ferme automatiquement les portes de la discussion, et en conséquence, les bienfaits de l’intelligence collective. C’est un peu comme dire “J’ai décidé que”, mais sans l’assumer.

Non, en général, on ne s’entend pas tous. J’invite les gens qui utilisent régulièrement cette approche à essayer de parler en dernier, et constater par eux-même à quel point les opinions divergent. Et, au risque d’en surprendre plus d’un, souvent les gens ont des idées bien meilleures que nous!

J’entends ce que tu dis, mais…

Je crois qu’il s’agit là de l’affirmation la plus honnête et assumée à l’effet que l’on n’écoute absolument pas son interlocuteur. On “entend” ce que la personne dit, bien sûr. Déjà que les gens, en général, écoutent pour répondre et non pour comprendre, se limiter à “entendre” retire toute forme de participation relié au contenu de la discussion.

On entend, mais on ne prend pas la responsabilité de prendre position sur le sujet. Un désengagement total par rapport à la discussion et à notre interlocuteur. Si une personne ne fait que vous entendre sans écouter, en feriez-vous un confident? Moi non plus.


À propos de l’auteur

Olivier Fortier cultive l’épanouissement des gens. Il rêve d’un marché du travail où chacun est épanoui et en contrôle de sa carrière. En tant que gestionnaire, il préconise une l’approche “les gens d’abord, et le reste suivra”. Ses sujets de prédilection sont la culture organisationnelle, le droit à l’erreur, les relations leader-leader et l’abaissement du centre de gravité du pouvoir décisionnel.

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